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Le théâtre algérien en quête de gloire

Jeudi 12 Avril 2018 - 15:20
Le théâtre algérien en quête de gloire

 
Né dans un contexte colonial, le théâtre en Algérie a construit son champ d'expression en fondant un répertoire inspiré du patrimoine universel et des questionnements politiques et sociaux de la société algérienne.

Au fil de l’histoire, des troupes sont ainsi nées, des œuvres ont été créées pour représenter l’Algérie coloniale, révolutionnaire puis indépendante, pour dire ensuite l’Algérie désenchantée, l’Algérie souffrant du terrorisme et enfin pour montrer l’Algérie contemporaine qui s’efforce de sortir des dogmes, de la censure et du discours "officiel" imposé.

L’invocation historique qu’elle soit centrée sur une thématique ou l’instrument d’une démonstration a marqué les moments forts de l’histoire même du fait théâtral. Outil d’investigation du passé ou simple véhicule du commémoratif, le théâtre algérien a construit en grande partie son ancrage dans les pratiques culturelles par les essais d’illustration historique qu’il a pu proposer.

Mais, loin des débats controversés sur son apparition, il semble intéressant d’évoquer la date de mai 1853 où le maréchal Randon, Gouverneur général d’alors, ordonna la construction d’une salle d’opéra, devenant par la suite Opéra Impérial d’Alger qu’il inaugure le 29 septembre 1853, avec à sa tête une femme comme directrice, Madame Curet. Autour de l’édifice de la place Tantonville, d’autres salles de spectacles verront le jour, accueillant des danseuses, musiciens, orchestres classiques, ballets et troupes de vaudevilles composées d’amateurs essentiellement issus de familles de colons.

A la veille de la première guerre mondiale, des personnages divers apparaissent dans des spectacles de Garagouz, formant peu à peu un véritable répertoire joué lors de cérémonies telles que les mariages, les circoncisions, ou lors des pèlerinages des Zawiyyas, à l'occasion desquels les gens de la ville apportaient le Rgab, la musique inaugurant ces célébrations.

Des confréries se produisent également lors de ces cérémonies dont une, la confrérie des Îssawas, qui laissera une trace mémorable à travers le Maghreb en raison du caractère très spectaculaire de ses danses rituelles. Mais des spectacles occidentaux comme le boulevard et le vaudeville ont pu, dans l'Algérie coloniale, influencer les pionniers du théâtre algérien que furent Rachid Ksentini, Allalou et Mahieddine Bachtarzi, Bach Djarah et Mme Keltoum.

Ces figures allaient constituer le premier noyau de dramaturges algériens qui allaient accompagner, de façon soutenue, le mouvement d’affranchissement qui s’est saisi du peuple algérien, puisque durant la Révolution algérienne, des troupes théâtrales faisaient des tournées à travers plusieurs pays du monde, dans le but de faire connaître le combat que menaient les Algériens contre la domination coloniale.

Après l’indépendance, le théâtre algérien va suivre la même trajectoire que le cinéma. Cependant, l’avantage du théâtre a été d’être plus critique à l’égard de certaines transformations sociales, politiques et culturelles que connaissait la société algérienne. Animées par des dramaturges de talent à l’image de Kadour Naimi et Kateb Yacine, ces pièces avaient pour thèmes dominants les principales préoccupations des Algériens face au changement de statuts et de mœurs.
    

Par la suite, une nouvelle vague de jeunes comédiens et de dramaturges font leur apparition sur la scène théâtrale, une épopée qui fut menée par des figures telles que Abdelkader Alloula, Allel Mouhib, Hadj Smaine, Med Seghir, Azeddine Madjoubi, Benguettaf et Slimane Benaïssa. Cette nouvelle génération d'artistes prend le relais des aînés qu'étaient Allalou, Bachtarzi et Ksentini en suscitant l'éclosion de nombreux collectifs qui se donneront pour mission de faire exister, à travers la création théâtrale, une culture algérienne, malgré l'impact historique de celle du colonisateur.

Certains, comme Abdelkader Alloula, œuvreront pour la création d'une troupe autonome conçue selon un modèle quasi-professionnel. Mohamed Boudia, quant à lui, fondera sous l'égide du Ministère de l'éducation, le Théâtre national d'Alger (TNA) dont il sera le premier administrateur et nationalisera tous les théâtres, dans la perspective d'un théâtre algérien à vocation universelle.

C'est dire que de nos jours, l’activité théâtrale algérienne est marquée par des programmes de création locale et d’adaptation de pièces de grande renommée. L’Algérie dispose à ce titre d’un théâtre national, de sept théâtres régionaux et de nombreuses troupes dites de "théâtre amateur".

En effet, il existe en Algérie comme dans le reste du monde arabe, des formes d'expression théâtralisées, telles celles des conteurs dans les spectacles de Halqa, ou des Meddhas. S'y ajoutent d'autre formes, telles que les sketchs joués à l'occasion de pèlerinages, ou le théâtre d'ombres. Toutefois, le débat a fait rage entre spécialistes pour savoir si ces formes avaient influencé ou pas le théâtre, certains y voyant une forme de proto-théâtre, tandis que les autres reprochaient aux premiers une vision occidentale.

Force est de souligner que dans les décombres d’une crise qui souffle sur le pays, des textes nouveaux voient le jour, écrits par des dramaturges qui trouvent leur place dans l’héritage d’auteurs tels que Alloula et Kateb Yacine. Toutefois, ils se démarquent de ceux-ci par une écriture nouvelle. N’affirmant pas explicitement son engagement, cette écriture dénonce pourtant, mais à travers l’usage de l’ironie, du délire chez Mustapha Benfodil ou à travers l’insistance sur des données historiques et sociales comme chez Maïssa Bey.

D’aucuns estiment, en effet, que le théâtre algérien actuel n’est généralement que le reflet de la caste qui domine la situation culturelle du pays, laquelle, à son tour, est le produit du système social qui régit la nation. Dès lors, ce n’est pas uniquement le théâtre algérien qui manque d’autonomie et d’organisation, mais l’ensemble des domaines sociaux où les citoyens devraient conquérir leur autonomie et leur auto-organisation.

Pour raviver le quatrième art, les professionnels appellent les jeunes auteurs à adapter les grandes œuvres de la littérature algérienne. De même pour les metteurs en scène, en les appelant à créer de nouveaux outils permettant de meilleures créations artistiques.

Ainsi, le public n’en sera que captivé et le théâtre, que les spectateurs adorent, retrouvera sa popularité et son authenticité

Source : MAP


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