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Gaza : restaurer la mémoire au milieu des ruines

Hier 16:43
Gaza : restaurer la mémoire au milieu des ruines
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À Gaza, les ouvriers travaillent dans un silence pesant, troublé seulement par le bourdonnement des drones israéliens. Seau après seau, une dizaine d’hommes dégagent le sable et les gravats du Musée du Palais du Pacha, l’un des plus anciens sites historiques de la ville. Ce complexe, emblématique du patrimoine architectural palestinien, a été lourdement endommagé par deux années de bombardements.
Les ouvriers trient les pierres à la main : celles qui pourront être réutilisées pour une éventuelle restauration sont mises de côté, les autres rejoignent la montagne de débris.

Le Palais du Pacha, témoin d’une histoire plurielle

« Le Musée du Palais du Pacha est l’un des sites les plus importants détruits pendant la guerre à Gaza-ville », confie à l’AFP Hamouda al-Dahdar, expert du patrimoine culturel. Selon lui, plus de 70% des bâtiments du complexe ont été détruits.
Construit en pierre ocre, ce fort ancien abriterait une chambre où Napoléon Bonaparte aurait passé une nuit en 1799. L’histoire du lieu illustre la richesse archéologique de Gaza, où se côtoient des vestiges cananéens, égyptiens, perses, grecs, byzantins et islamiques.

Destruction à grande échelle

Selon un rapport publié en octobre par l’Unesco, 114 sites culturels ont été endommagés depuis le début du conflit opposant Israël au Hamas, le 7 octobre 2023. Parmi eux, le monastère de Saint-Hilarion, l’un des plus anciens monastères chrétiens du Moyen-Orient, et la mosquée al-Omari de Gaza-ville.
Mais pour les spécialistes locaux, le bilan est encore plus lourd. « Nos équipes ont recensé au moins 226 sites patrimoniaux et culturels touchés », affirme Issam Juha, directeur du Centre pour la préservation du patrimoine culturel, basé en Cisjordanie. « Nous avons pu accéder à des zones non incluses dans l’évaluation de l’Unesco », précise-t-il.

Restaurer sans moyens

Les restaurateurs font face à une double contrainte : le manque de matériaux et l’insécurité persistante. « Nous nous contentons de trier les pierres et de consolider les structures les plus fragiles », explique Juha. Les restrictions imposées à Gaza depuis le début de la guerre ont provoqué de graves pénuries, y compris en ciment et en outils de construction.
Le cessez-le-feu négocié par les États-Unis en octobre dernier a permis une reprise partielle des activités humanitaires et de restauration, mais les procédures restent lourdes. « Pendant des mois, il était dangereux de travailler. Les drones tiraient parfois sur les zones que nous devions inspecter », raconte Dahdar.

Sauver la mémoire du peuple palestinien

Avant la guerre, le musée abritait plus de 17.000 artefacts retraçant plusieurs millénaires d’histoire. « Ils ont tous disparu après l’invasion de la vieille ville », regrette Dahdar. L’équipe a néanmoins pu récupérer une vingtaine de pièces majeures datant des époques romaine, byzantine et islamique.
Sur le site, un artisan restaure une pierre ornée d’une croix surmontée d’un croissant islamique, symbole des croisements de civilisations à Gaza. « Ce n’est pas seulement un bâtiment ancien. C’est la mémoire vivante d’un peuple et le témoin de son identité », conclut Dahdar.



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